De manière intermittente, les agriculteurs et agricultrices expriment leur colère.
Première préoccupation affichée : leur revenu. Certes, 18,1% des ménages agricoles vivent sous le seuil de pauvreté. Mais pourquoi ceux qui votent (la moitié des agriculteurs) votent-ils à 50% pour la FNSEA ? Les géants de l’agroalimentaire, dont font partie les dirigeants et en particulier le président de cette organisation farouchement attachée au libéralisme même si, aujourd’hui, elle fait semblant de s’opposer à l’accord Mercosur, ont profité des crises pour accroître leurs profits et leurs marges. Entre fin 2021 et début 2023, le taux de marge des industries agroalimentaires est passé de 28 à 48 %.
Tandis qu’une minorité tire profit de ce système, une majorité des agriculteurs subit des inégalités qui ne leur permettent pas de vivre de leur travail. Alors que les prix d’achats aux agriculteurs sont ridiculement bas, les prix de l’alimentation n’ont jamais été aussi hauts depuis les années 80. Le géant mondial du lait Lactalis a annoncé, en avril dernier, avoir dépassé les 28 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022. La fortune de ses propriétaires, les 3 frères et soeur Besniers, s’élève à 43 milliards de dollars, soit l’équivalent de 2,5 millions d’années de revenus pour un éleveur bovin. L’agro-industrie et la grande distribution s’accaparent la valeur des productions et sont les grandes gagnantes de ce système inégalitaire.
Les aides publiques, négociées par la FNSEA, notamment celles de la Politique Agricole Commune, restent très majoritairement orientées vers les grandes exploitations, laissant les plus petites seules face à l’inflation et la hausse de l’énergie. Alors que 33% du budget de l’Union Européenne sont dédiés à la PAC, les aides sont calculées à l’hectare ou à la tête de bétail, ce qui favorise mécaniquement les grandes exploitations. Les agricultrices, sont encore plus lésées par ce système de répartition puisqu’elles exercent dans des domaines aux surfaces moindres. Conséquence : leur revenu est de 29% inférieur à celui de leurs collègues masculins.
Il est plus que temps -même s’il n’est jamais trop tard !- de repenser l’agriculture française. Une agriculture saine, qui permette à la fois de nourrir correctement les Français, de conserver la nature et nos paysages et de donner un revenu correct aux paysans. Ce ne fera pas sans des agriculteurs qui s’y engagent ni sans une puissance publique qui pense plus l’avenir de nos concitoyens que les profits de quelques-uns.