Grève à la SNCF : quelle horreur !
Par Yves MESCOFF - Journal RESO n° 234 - Mars 2024
Mis en ligne le 15 mars 2024

Rassurez-vous, ce n’est pas moi qui le dit. En revanche, c’est ce qu’on a pu entendre sur tous les plateaux télé lors de la dernière grève des contrôleurs SNCF au moment des vacances scolaires de février. Même le Premier ministre y est allé de son couplet, fustigeant ceux qui osaient priver une partie des Français de leurs vacances à la neige ou de leurs enfants qui ne pourraient aller voir leurs grands-parents. Oubliant au passage que seule une petite minorité était concernée.

Comme à chaque fois qu’une grève touche les transports publics, les députés et sénateurs de droite y sont allés avec leurs propositions d’interdire la grève pendant certaines périodes. Oubliant par exemple que les vacances scolaires n’ont pas lieu tous les ans aux mêmes dates ni pour la même période dans toutes les régions. Et que la grève étant un principe constitutionnel, en limiter l’exercice n’est possible qu’à des conditions très strictes.

Mais, à part ces cris d’orfraies, on chercherait vainement du côté de la droite ou du gouvernement quelqu’un pour s’interroger sur le fait qu’une grosse partie des contrôleurs s’est mise en grève, soulignant le caractère légitime de leurs revendications qui ne sont d’ailleurs pas toutes salariales.

Derrière des chiffres de salaires moyens qui ne veulent pas dire grand-chose mais donnent l’impression d’une catégorie de salariés privilégiés, la vérité c’est que les contrôleurs n’ont pas le sentiment d’être reconnus pour leur travail difficile - surtout dans une période où les incivilités sont légion - ni d’être justement compensés pour les contraintes de leurs métiers qui les amènent souvent loin de chez eux, y compris le week-end.

Comme à leur habitude, on a aussi entendu certains politiques vanter les mérites de la concurrence, feignant d’oublier que celle-ci a pour conséquence de complexifier la vie des usagers ou que la Grande-Bretagne a dû renationaliser en partie son réseau suite aux nombreuses défaillances et accidents liés à la recherche du profit à tout prix.

Car, contrairement à ce que certains avancent, la concurrence en matière de transports publics n’est pas aussi rentable que cela pour les sociétés privées. L’achat de matériels, le coût du péage pour l’entretien des voies ont amené certains possibles concurrents de la SNCF à renoncer à leurs projets. L’objectif de la mise en concurrence – faire baisser les prix - n’est le plus souvent qu’un trompe-l’œil. Cà conduit à des achats massifs de publicité qui finissent par rogner les marges et par inciter à sacrifier le plus important : la sécurité.