Journal RESO n° 230
Novembre 2023
Mis en ligne le 17 novembre 2023

Au sommaire ce mois-ci :

p.1 et 2 : L’édito / p.2 : International : On vote au Chili / p.3 à 6 : Place au débat : Notre boussole contre l’extrême-droite / p.7 : Actualité sociale : Le RSA – Avez-vous remarqué ? Les oukazes libérales de Bruxelles sur la SNCF / p. 8 : Coup de gueule : La poste veut-elle encore s’occuper du courrier ? – Les bras m’en tombent : Nominations à la légion d’honneur

L’édito de Marinette Bache

Certes, la situation au Proche-Orient qui risque d’embraser au-delà de la Palestine, occupe nos pensées d’autant plus qu’elle fige chacun sur ses soutiens alors que la recherche d’une solution de paix juste exigerait de s’attacher à la Raison et à la diplomatie (quelle perte que la disparition de la voix de la France…) et d’apporter un soutien sans faille à ceux qui, de part et d’autre -et même si, aujourd’hui, ils sont peu nombreux- recherchent une voie de paix.

Cependant, on ne doit pas se laisser détourner du fait, qu’en France, Macron continue de mener une guerre sociale sans merci contre le monde du travail qui a entrainé la révolte populaire des gilets jaunes fin 2018 -et cette blessure n’est pas refermée- et le formidable mouvement contre la réforme des retraites de janvier à mai de cette année -qui a démontré l’ampleur du rejet de ce pouvoir. Malgré cela, le gouvernement libéral de Macron continue d’éclater notre société, de brader emploi et industrie, de détruire nos services publics, de s’en prendre à tous nos systèmes de solidarité -et au 1er rang à la Sécurité sociale.

Le vote du budget de la Sécu démontre que le gouvernement n’a pas changé depuis les grandes mobilisations contre la casse des retraites. La même politique libérale comme les mêmes méthodes anti-démocratiques sont à l’œuvre. Ce projet de loi avait été rejeté par la commission des Affaires sociales ; il avait reçu un avis défavorable de l’union nationale des complémentaires santé et de la Mutualité française ; enfin il rencontrait une opposition unanime des organisations syndicales et des groupes parlementaires -à l’exception des Macronistes. Alors la 1ère ministre en est revenue à ses bonnes vieilles méthodes : le 49-3.

Cette unité contre le PLFSS a cependant fait reculer l’Exécutif sur plusieurs des mesures qu’il avait envisagées : Ainsi il n’y aura pas d’augmentation des franchises médicales alors que la 1ère mouture prévoyait de doubler les franchises médicales qui seraient passées, pour le patient, de 50 centimes à 1 euro à chaque boîte de médicaments et également de 1 à 2 euros pour la consultation médicale. Même recul sur la ponction envisagée sur les excédents de l’Agirc-Arrco. L’unité syndicale, de la CGT à la CFE-CGC en passant par FO et la CFDT et l’ensemble des autres organisations, paie. Dans le même registre, la « Conférence sociale sur les bas salaires » a accouché d’une souris : la création d’un Haut conseil des rémunérations et l’annonce d’un comité chargé d’étudier l’articulation entre salaires, exonérations de cotisations et versement de la prime d’activité. Elisabeth Borne n’a évoqué aucune mesure en faveur des bas salaires, même pour les fameuses « deuxièmes lignes », tant saluées pendant la pandémie de Covid-19 et dont on voit encore l’efficacité des « lignards » d’Enedis lors de la tempête Ciaran.

La question des demandeurs d’emploi est également traitée avec le même mépris. L’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) établissement public administratif créé en 1967 avait pour but de centraliser les offres et les demandes d’emploi, d’effectuer des statistiques sur le nombre de demandeurs d’emploi et d’aider les chercheurs d’emploi dans leurs démarches. Avec l’Unédic, elle formait le service public de l’emploi et concrétisait le droit au travail reconnu par la Constitution de la Vème République. L’ANPE a subi une première attaque en 2008 sous Sarkozy quand elle a été fusionnée avec les Assédic pour devenir « Pôle emploi ». Nous avons franchi, le mois dernier, une nouvelle étape par la transformation de « Pôle emploi » en « France Travail » dont le 1er objectif est de culpabiliser les chômeurs et de faciliter leur mise à l’écart de la société. La 1ère mesure en est un exemple : le RSA sera conditionné à 15 heures de travail hebdomadaire ; salauds de pauvres, quoi ! (...)

Parallèlement, il n’y a pas que des perdants au paradis macronien. Les dividendes versés par les entreprises du CAC 40 à leurs actionnaires ont atteint un montant record de 57, 5 milliards en 2021 soit une hausse de 32% par rapport à l’année précédente. On attend les chiffres de 2022 ! La rémunération moyenne d’un patron du CAC a progressé de 52% pour atteindre en moyenne de 6,6 millions d’euros. Ces mêmes entreprises ont dépensé 65000 euros par an par salarié ... (et encore : salaires des cadres supérieurs compris). La France est devenue un des pays le plus généreux de la planète pour la rémunération des actionnaires en même temps que le pouvoir d’achat des salariés est en berne. De l’augmentation du SMIC, à l’indexation des salaires sur l’inflation, c’est toujours le même refus catégorique, au nom de la bonne gestion de l’économie ... libérale. Peut-on parler de « bonne gestion » quand notre commerce extérieur s’effondre ou que l’importance de l’industrie dans notre PIB diminue de manière effarante ? Nous sommes d’ailleurs parmi les plus mauvais élèves de l’Europe, alors que la part des salaires dans la valeur ajoutée stagne ou diminue … contrairement à celle de la rémunération du capital…

Un exemple : TotalEnergie. Le pétrolier français continue d’enregistrer des profits faramineux. La société a engrangé un nouveau bénéfice de 6,4 milliards d’euros au 3e trimestre, en hausse de 1,5% par rapport au même trimestre de l’année 2022… qui était pourtant une année record. Le PDG, Patrick Pouyanné, a annoncé à ses actionnaires la distribution d’un troisième acompte sur dividende de 0,74€/action au titre de l’exercice 2023, en hausse de plus de 7% par rapport à 2022. Mais le gouvernement, lui, se refuse à imposer un contrôle du prix de l’essence, tout juste s’il exprime auprès de ces messieurs son souhait que la hausse ne soit pas trop forte… TotalEnergie a obtenu que la taxe exceptionnelle sur les raffineurs ne soit pas retenue dans le budget de l’État pour 2024. La société menaçait de stopper ses prix à 1,99€ à la pompe en cas de prolongation de cette mesure fiscale qui, de plus, n’aurait eu que peu d’impact sur ses profits…

De nouvelles prises de conscience que « ça ne peut plus durer » sont à attendre de la part de notre peuple. On ne peut pas dire aujourd’hui quelle ampleur elles auront, quelles formes elles prendront ni quel débouché elles pourront avoir. Mais cette mobilisation est nécessaire. Sans elle on ne pourra mettre fin à la casse de notre pays.

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